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lycée banlieue culture
28 juillet 2012

La loi de séparation de 1905

La loi de séparation des Eglises et de l’Etat (1905) est l’œuvre d’Aristide Briand, socialiste modéré. Il fut conseillé par des protestants libéraux, ce courant jouant un rôle important au début de la IIIe République.  Le monde catholique étant jugé peu fiable par les républicains, ceux-ci manquaient de personnel politique et avaient besoin d’alliés.
Adoptée le 9 décembre 1905, la loi reconnaît la liberté de conscience et de culte et ajoute que « la république ne reconnaît, ni ne subventionne aucun de ces cultes ».>
La loi met fin aux concordats napoléoniens noués avec les catholiques, les protestants et les juifs. Les Eglises recouvrent leur liberté et l’Etat n’intervient plus dans les nominations. Comme l’Etat ne les subventionne plus, elles perdent une partie de leurs ressources. Cela ne représentait pas un problème car l’Eglise avait un patrimoine étendu. La situation était différente pour les autres religions.

La loi était conçue comme une conciliation, un compromis que l’on supposait habile et équilibré.

Il n’en fut pas ainsi.

Cet échafaudage sophistiqué fut sérieusement secoué par les évènements. Ce qui démontre, soit dit entre parenthèse, la faiblesse politique des socialistes modérés, de fins esprits mais des individualités isolées qui manquaient d’habileté et de sens politique.
En effet, des difficultés intervinrent avec le Vatican.
- Celui-ci n’admet pas ne pas avoir été consulté. La loi de 1905 n’avait pas été négociée, c’était un acte unilatéral de la France.
- Que faire des biens de l’Eglise ? Celle-ci n’étant plus reconnue juridiquement comme une « personne morale », ses biens sont dévolus à des « associations cultuelles »  auxquelles le pape s’oppose. Par une encyclique du 11 février 1906 ; selon lui ces biens doivent être dévolus à la hiérarchie religieuse.

L’inventaire de ces biens en 1906 donna lieu à des incidents. Les laïcs n’y firent pas preuve d’un grand esprit de modération. Le percepteur, aidé des gendarmes voire de la troupe, se présentait devant les églises. De leur côté, les catholiques barricadés à l’intérieur des édifices religieux étaient ravis de jouer aux martyrs….
Une vraie pièce de théâtre !

Ces affrontements étaient d’autant plus curieux – anachroniques – qu’en 1905 l’Eglise ne constituait plus une menace pour la République. Certes, jadis elle avait défendu avec fougue la monarchie et l’influence des châtelains, mais depuis, beaucoup d’eau avait coulé sous les ponts. En 1905 l’Eglise reconnaît la République, autrement dit la démocratie et les droits de l’homme. Cette reconnaissance est timide, hésitante, refusée par une partie des fidèles voire de la hiérarchie, mais elle était là.
De surcroit, dans beaucoup de milieux (bourgeoisie parisienne, monde ouvrier, paysannerie du Massif Central…) la pratique de la foi s’affaiblissait. La déchristianisation était importante ce qui explique qu’aux yeux de beaucoup de Français les liens que le Concordat établissait avec les religions paraissaient un archaïsme.

Comment expliquer l’anachronisme des affrontements de 1906 ?

1) Dreyfus débute en 1894, s’amplifie en 1896 et explose en 1898 avec le « J’accuse » de Zola. Les deux camps s’affrontent brutalement. Or la droite catholique prend majoritairement position contre Dreyfus. L’Affaire relance le vieux conflit catholiques/laïcs.

2) Après le vote des lois de Jules Ferry sur l’Ecole en 1881, un « problème » restait en suspens, celui des congrégations catholiques qui dirigeaient des établissements scolaires. Elles étaient de plus en plus nombreuses. 
Les gouvernements républicains modérés (1879-1899) avaient laissé faire.
En 1899 les radicaux arrivent au pouvoir. Waldeck-Rousseau est nommé président du conseil. Sa loi de juillet 1901 sur la liberté des associations vise dans son chapitre III les congrégations jusque là non encore autorisées qui deviennent soumises à autorisation. Les préfets acquièrent un pouvoir de contrôle sur les biens des congrégations.
En 1902 la fermeture des écoles provoque des incidents.
En 1903 la plupart des demandes d’autorisation présentée par les congrégations est repoussée par le gouvernement d’Emile Combes, successeur de Waldeck-Rousseau.
Le 7 juillet 1904 une loi interdit aux associations même autorisées le droit  d’enseigner.
La même année, la France rompt ses relations diplomatiques avec le Vatican.
Un moment, certains furent partisans de confier à l’Etat le monopole de l’enseignement. Mais dans les rangs des laïcs figuraient aussi beaucoup de spiritualistes ou déistes qui n’étaient pas favorables au jusqu’auboutisme.

 A vrai dire, le conflit sur les écoles religieuses n’avait rien d’une fatalité. On aurait pu le régler autrement, avec compromis. Il n’’avait rien non plus d’une nouveauté, les rois d’autrefois s’étant eux aussi heurtés souvent aux « associations » religieuses (Philippe Iv et les templiers, Louis XIV et les jansénistes, et même le très traditionnel Charles X..).
Mais les élites radicales furent poussées à l’intransigeance par leur base. Et l’Etat, qu’il fut « chapeauté » par un roi ou par un président, continuait sur sa logique multiséculaire d’un renforcement toujours croissant de son pouvoir.
La loi de 1905 et toutes les mesures relevant de cette laïcité à la française révèlent cette vieille passion toute française pour l’unité nationale et le pouvoir administratif.

La loi de 1905 fut la dernière grande victoire du camp laïc. Après 1918 il y avait d’autres priorités.  Lorsque le gouvernement radical d’Edouard Herriot porté au pouvoir par les élections de 1924 tente de ranimer la querelle, d’étendre la loi de 1905 aux départements d’Alsace-Lorraine qui venaient de rentrer dans le giron français, il échoue.

 

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