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lycée banlieue culture
7 avril 2010

Cingria et l’Histoire-poésie

 

Pour Cingria l’Histoire est une poésie et non une science triste

Charles-Albert CINGRIA, La Reine Berthe.

Editions l’Age d’Homme, Lausanne 1992

 

 

Charles-Albert Cingria, romancier et poète suisse (1883-1954).


La Reine Berthe. Fille de Bourcard de Souabe, Berthe fut reine de 922 à 937 par son mariage avec Rodolphe II, roi de Bourgogne Transjurane, lequel devint également roi de l'Italie franque. A sa mort, Berthe épousa Hugues d'Italie, mais le quitta vers 940 pour retourner dans le Pays de Vaud.

 

Cingria et l’Histoire

Charles-Albert Cingria résiste aux tentatives « dépoétisantes » des historiographes du XIXe siècle qui critiquaient les légendes. Sous sa plume, l'histoire devient une agréable chronique, avec un peu de science mais beaucoup de joie et de poésie.

Dans sa préface Charles-Albert CINGRIA explique sa conception de l’histoire. Il refuse l’histoire comme science « dénégative ». Par là, il accuse ainsi le « rénanisme », du nom d’Ernest Renan, intellectuel du XIXe s qui tenta une lecture scientifique des évangiles. Le chrétien qu’était Cingria ne pouvait qu’être choqué par ce travail. Maintenant dans les écoles suisses, on affirme même que Guillaume Tell n’a pas existé, gémit-il. A ce compte-là, il faut considérer que le Pôle Nord lui-même n’existe pas non plus. Pour exister il faut croire. Si l’on insiste sur les faits, c’est le règne de la tristesse, de l’anti-poésie.


On l’aura compris, Cingria n’a rien d’un historien. Celui qui utiliserait son livre pour comprendre le Xe siècle s’exposerait à des déconvenues. Il l’avoue lui-même, d’ailleurs : « c’est donc moins l’histoire que nous nous sommes proposés d’écrire que le témoignage de tour inimitable de ceux qui l’ont primitivement tracée ». Il veut produire « un spectacle », c’est un impressionniste. Ce livre doit être considéré comme un poème, un tableau, une aquarelle.

Cependant il pose de vraies questions. L’histoire totalement objective existe-t-elle ? « Nous ne connaîtrons jamais la calorie propre d’êtres que nous n’avons pas approchés » explique Cingria. Quoique l’on fasse, quoique disent les médiévistes, nous ne connaîtrons jamais Lothaire Ier mais plutôt l’image que transmettent de lui les textes et les miniatures. « Il ne faudrait dès lors que des images et, pour texte, le document même ».

 

 

Depuis Cingria, d’autres ont montré les limites du rationalisme.

Alain Robbe-Grillet, Le Miroir qui revient.

« Le réel est discontinu, formé d'éléments juxtaposés sans raison dont chacun est unique, d'autant plus difficiles à saisir qu'ils surgissent de façon sans cesse imprévue, hors de propos, aléatoire »

 

Paul Veyne, Comment on écrit l’histoire.

« Même si j’étais Bismarck qui prend la décision d’expédier la dépêche d’Ems, ma propre interprétation de l’événement ne sera peut-être pas la même que celle de mes amis, de mon confesseur, de mon historien attitré et de mon psychanalyste ».

 

Paul Ricoeur, Histoire et vérité.

« Nous attendons de l'histoire une certaine objectivité, l'objectivité qui lui convient. Cela ne veut pas dire que cette objectivité soit celle de la physique ou de la biologie : il y a autant de niveaux d'objectivité qu'il y a de comportements méthodiques ».

 

Pour revenir à Cingria, son livre plaisant évoque avec sérieux et imagination la politique dans les Alpes du nord vers l’An Mil. Il est aussi question de l’Italie et de Constantinople.

Parce qu’il a du style, nous lui pardonnerons son chauvinisme et son traditionalisme. 

 

Voir aussi

http://www.fluctuat.net/livres/chroniques01/cingria.htm

http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=3070

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