Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
lycée banlieue culture
13 janvier 2009

Terre natale, ailleurs commence ici

Terre natale

Ailleurs commence Ici

Voici une expo qui concerne directement le programme de géographie de 2de et de Terminale. Il est possible d’y emmener une classe.

L’exposition parle des migrations, des flux, des notions de nomadisme et de sédentarité, et aussi de l’« identité ». Elle est le fruit d’une collaboration entre Raymond Depardon (cinéaste et photographe) et Paul Virilio (urbaniste). img691

Cela se passe à la Fondation Cartier, à Paris, à deux pas de la place Denfert-Rochereau, dans un immeuble moderne et spacieux, sur une avenue large où un bus scolaire peut facilement stationner.

Fondation Cartier

Jusqu’au 15 mars 2009

De 11 h à 20 h

Mardi nocturne jusqu’à 22 h

20 bld Raspail

Paris 14me

01 42 18 56 50

métro Raspail ou Denfert

bus 38, 68, 88, 91

station RER Denfert

- D’abord, descendre au sous-sol.

Commencez par la deuxième salle,  circulaire. Sur le mur se trouve un écran d’environ 300° sur trois mètres de hauteur. Des planisphères très bien faits se succèdent. Le traitement informatique des images est une pure merveille artistique. Du très-très beau travail d’informaticien.

Assis sur la moquette au centre de la pièce, nous sommes bouche bée.

Ensuite seulement vous reviendrez à la première salle, rectangulaire, celle avec les petits écrans de télévision au plafond. Vous écouterez l’interview de Paul Virilio dans un coin de la salle.

Des brassages gigantesques vont se produire au XXIe s. D’où cette interrogation : que reste-t-il de la terre natale aujourd’hui ?

Dans les prochaines décennies un milliard de gens va se déplacer, soit d’un pays à un autre, soit à l’intérieur des frontières d’un même Etat. C’est comme si la Chine entière déménageait ! Il s’agira du plus grand déplacement humain de l’histoire, il atteindra une ampleur qui dépassera les migrations trans-océaniques des années 1850-1920.

Ces déplacements seront de toutes sortes : pour trouver du travail, pour passer des vacances, pour fuir une guerre civile ou une dictature, pour fuir une région dévastée par une cyclone, une sécheresse ou un tsunami.

Le réchauffement climatique est provoqué par l’augmentation du taux de dioxine de carbone dans les pays du Nord. L’élévation du niveau des océans mettra en danger les villes situées à moins de cent kilomètres du rivage. Le nombre de catastrophes naturelles augmentera. L’Afrique se réchauffera encore plus et les océans glaciaires tiédiront.

Le nombre de réfugiés environnementaux excèdera celui des réfugiés politiques.

A vrai dire, je me demande si les auteurs de l’exposition ne sombrent pas un peu dans l’intégrisme et le catastrophisme écolo. Ils oublient de dire que l’Europe de l’est se réchauffera ce qui devrait offrir de meilleures conditions de travail aux agriculteurs russes, biélorusses et ukrainiens. Idem au Canada et en Chine du nord.

800px_US_Mexico_border_fence

800px_Tijuana_san_diego_border_deathsUn peu partout des murs se construisent pour barrer la route aux migrants : entre les Etats-Unis et le Mexique, entre la Chine et la Corée etc. A Padoue (Italie), il y a un mur entre le quartier rom et le reste de la ville.

Ces murs ne sont d'aucune efficacité réelle. Ils ne supriment pas les flux migratoires.  Ils "servent" à rassurer les populations et à discriminer les migrants.

Les camps de réfugiés se multiplient. On compte environ 38 situations de ce type, regroupant environ six millions de réfugiés. Ils échappent au contrôle étatique, ils dépendent des organisations humanitaires qui deviennent en quelque sorte un gouvernement mondial, un Etat d’un type nouveau se superposant aux Etats-nations classiques.

Les principales régions de départ des réfugiés politiques sont les Balkans, le sud de l’ex URSS, l’Afrique équatoriale. La principale région de destination est l’Europe de l’ouest, bien plus que l’Amérique du nord.

Il y a aussi des mouvements internes à un pays, à cause des guerres civiles comme au Congo.

Cela remet en cause la notion « d’identité ». Ah ! quel mot détestable ! Je ne supporte plus ces discours sur les pseudo  "identités" française, européenne, chrétienne, musulmane, corse, algérienne, arménienne etc.

Paul Virilio explique dans un reportage sur grand écran que l’identité va disparaître au profit de la traçabilité. Grâce au téléphone portable, à l’ordinateur portable, à internet etc., le sédentaire sera partout chez lui. Confortablement installé dans le fauteuil d’un avion au-dessus de l’Atlantique, il communiquera avec sa fille qui dans sa chambrette de Nanterre lui demande des conseils pour un devoir de géographie ; grâce à une web-cam il pourra la voir et lui demander pourquoi elle porte du rouge à lèvres…

La vitesse des communications rend le monde plus petit, bouleverse les notions de temps et d’espace. La planète, jadis immense, infinie, se ratatine. C’est la disparition de la grandeur du monde.

La ville du futur consistera en une connexion ou un réseau de ports, d’aéroports, de gares, de télécoms etc. C’est ce que Virilio nomme « l’outre-ville ». « Ailleurs » commence ici. « Ailleurs » et « ici », cela deviendra pareil.

La terre natale va disparaître. Les racines mourront elles aussi. Finis les hommes-plantes-enracinés ! Bienvenue aux hommes-oiseaux-migrateurs ! L’identité n’existera plus ou plutôt va se complexifier. Chacun de nous aura plusieurs dizaines d’identités avec lesquelles il pourra jouer, brandissant l’une d’elles avant de la mettre dans sa poche pour en brandir une autre. Nous aurons plusieurs identités, un peu comme nous avons plusieurs clefs (appartement, voiture, boite aux lettres…).

Un autre planisphère montre que les migrants envoient 240 milliards d’euros vers leur pays d’origine. 60 PVD reçoivent 66 % de l’argent envoyé. 15 % des pays accueillent 80 % des migrants et 90 % des transferts d’argent viennent de ces pays.

Après cette promenade émerveillée au sous-sol, vous reviendrez au R-de-C avant de monter au premier étage voir des reportages de Raymond Depardon sur les sédentaires accrochés et rivés à leur terroir ancestral.

Ce sédentaire, qu’il soit agriculteur dans le Massif central ou Indien de l’Amazonie, que deviendra-t-il ? Persécuté, oublié, écarté, nié, il ne plus sera nulle part chez lui. Il s’effacera.

Une indienne chipaya de Bolivie se plaint de sa vie dure, elle voudrait que ses enfants aillent à l’école pour avoir une meilleure situation. Elle parle avec fierté de sa langue natale. C’est ma langue. Cette langue n’existe nulle part ailleurs. Cette langue nous est propre.

Je suis née dans ma langue, dit une femme.

Une famille d’indiens mapuches du Chili vit dans une pauvreté incroyable, la femme interviewée pleure puis sèche ses larmes pendant que ses jeunes enfants s’accrochent à sa jupe.

Un Occitan parle de sa langue, le patouès. Il explique qu’il s’agit de sa langue naturelle. Il raconte comment les instituteurs d’autrefois punissaient les enfants qui parlaient patois pendant la récréation.

Il y a aussi un reportage sur une bretonne de l’île de Sein, sur les indiens Yanomani et Guarani.

Un indien quechua a quitté son village isolé de tout pour faire quelques emplettes en ville. Il raconte l’isolement, l’absence de routes, la longueur du trajet.

Un autre reportage montre de superbes femmes afars en Afrique de l’est. Elles guident leurs troupeaux dans une région semi-désertique. L’une d’elle chante : c’est notre pays, il est rien qu’à nous, notre souverain nous protège avec sagesse. Elles sont magnifiques et me rappellent de jeunes lycéennes peuls que j’ai eu il y a quelques années. Je les faisais rire en racontant que moi aussi j’étais peul et attendries par ce compatriote inattendu, elles tentaient de m’apprendre quelques mots. Elles étaient belles.

http://fondation.cartier.com/main.php?lang=1&small=0

img692

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité