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lycée banlieue culture
17 octobre 2008

Diderot, Kant, Montesquieu, Voltaire

Documents pour un cours sur les Lumières.

Ce cours n’est pas obligatoire, on peut éventuellement le sauter. Et je suis dubitatif devant l’acharnement des collègues d’histoire-géo et de français à parler des Lumières.

Les Lumières n’exercent plus le même effet d’entraînement qu'autrefois. Elles n’ont pas tenu toutes leurs promesses, elles ont menti, elles ont parfois été psycho-rigides.

Comment croire aux Lumières alors que chaque année de nouvelles guerres éclatent, que les génocides succèdent aux massacres, que les diplômes conduisent direct au chômage etc.

Les Lumières ne peuvent plus constituer le socle de la civilisation de demain. Il faut trouver autre chose pour lutter contre la barbarie. 

Le monde a changé, ils vivent sur des valeurs dépassées (Voltaire, Robespierre...).

Ceci dit, dans les banlieues sensibles, la crédulité de nombreux élèves, la force de l’obscurantisme religieux (musulman mais aussi protestant) dépasse les limites de l’admissible.

D’où l’intérêt de faire peut-être quand même (???) un cours sur les Lumières même si on demeure sceptique sur l’efficacité de ce genre de prêchi prêcha rationaliste.

Emmanuel Kant 1724 1804

Emmanuel Kant est né dans une famille d'artisans à Königsberg, au nord de la Prusse.

Kant devient précepteur (= professeur particulier des enfants) dans des familles nobles. En 1755, il enseigne à l'université de Königsberg. Il est en relation écrite avec toute l'Europe des scientifiques et des penseurs.

De l’utilité du doute  

« Dans toutes ses entreprises la raison doit se soumettre à la critique et elle ne peut par aucune défense porter atteinte à sa liberté sans se nuire à elle-même et sans s'attirer des soupçons défavorables. Il n'y a rien de si important par rapport à l'utilité, rien de si sacré qui puisse échapper à cet examen approfondi et rigoureux qui ne fait acception de personne. C'est même sur cette liberté que repose l'existence de la raison, qui n'a point d'autorité dictatoriale, mais dont la décision n'est toujours que l'accord de citoyens libres dont chacun doit pouvoir manifester sans obstacles ses doutes et mêmes son veto.

À cette liberté se rattache donc aussi celle de soumettre au jugement public ses pensées et ses doutes quand on ne peut pas les éclaircir soi-même, sans que, pour cela, on soit réputé un citoyen turbulent et dangereux. C'est ce qui résulte déjà du droit primitif de la raison humaine qui ne connaît d'autre juge que la raison commune elle-même où chacun a sa voix; et, comme c'est de là que doit venir tout perfectionnement dont notre état est susceptible, un tel droit est sacré et ne doit pas être aboli. »

"C'est même sur cette liberté que repose l'existence de la raison".

Kant, Critique de la raison pure, pages 507 puis 515.

Qu'est-ce que "les Lumières" ? (1784)

"Qu'est-ce que les Lumières ? La sortie de l'homme de sa Minorité, dont il est lui-même responsable. Minorité, c'est-à-dire incapacité de se servir de son entendement (= de sa raison) sans la direction d'autrui, minorité dont il est lui-même responsable, puisque la cause en réside non dans un défaut de l'entendement, mais dans un manque de décision et de courage de s'en servir sans la direction d'autrui. Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des lumières.

La paresse et la lâcheté sont les causes qui expliquent qu'un si grand nombre d'hommes [...] restent [...], leur vie durant, mineurs, et qu'il soit si facile à d'autres de se poser en tuteur des premiers. Il est si aisé d'être mineur! [...]

Je n'ai pas besoin de penser, pourvu que je puisse payer; d'autres se chargeront bien de ce travail ennuyeux. [...]

Or, pour les lumières, il n'est rien requis d'autre que la liberté; et à vrai dire, la liberté la plus inoffensive de tout ce qui peut porter ce nom, à savoir celle de faire un usage public de sa raison dans tous les domaines. Mais j'entends présentement crier de tous côtés : "Ne raisonnez pas !" L'officier dit : "Ne raisonnez pas, exécutez ! " Le financier: "Ne raisonnez pas, payez ! " Le prêtre: "Ne raisonnez pas, croyez !" [...] ll y a partout limitation de la liberté. [...] 

Kant, Réponse à la question : Qu'est-ce que les Lumières ?, 1784

Les Lumières et le Pouvoir

« Tout serait perdu si le même homme... exerçait ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d’exécuter les résolutions publiques et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers. dans la plupart des royaumes d’Europe, le gouvernement est modéré parce que le Prince qui a les deux premiers pouvoirs laisse à ses sujets l’exercice du troisième. Chez les Turcs où ces trois pouvoirs sont réunis sur la tête du Sultan il règne un affreux despotisme ».

Montesquieu, Lettre 11, 1721.

L’Acte déclaratoire

« Il est déclaré que lesdites colonies et plantations d’Amérique ont été, sont et doivent être subordonnées à la couronne et au Parlement de Grande-Bretagne. Sa Majesté le Roi, avec l’avis et conseil des Lords spirituels et temporels et des Communes de Grande-Bretagne, en Parlement réunis, ont eu, ont et doivent avoir toute autorité et tout pouvoir de faire les lois et les statuts qui sont valables et s’appliquent dans les colonies d’Amérique, sujettes de la couronne de Grande-Bretagne. Toutes les résolutions, décisions, motions, délibérations des colonies et plantations dans lesquelles le pouvoir et l’autorité du Parlement de Grande-Bretagne en matière législative sont mis en doute ou rejetées sont déclarées nulles et non avenues ».

Loi anglaise du 18 mars 1766.

DIDEROT

« Aucun homme n’a reçu de la nature la droit de commander aux autres. La liberté est un présent du ciel, et chaque individu de la même espèce a le droit d’en jouir aussitôt qu’il jouit de la raison. Si la nature a établi quelque autorité, c’est la puissance paternelle : mais la puissance paternelle a ses bornes ; et dans l’état de nature elle finirait aussitôt que les enfants seraient en état de se conduire. Toute autre autorité vient d’une autre origine de la nature. On la fera toujours remonter à l’une de ces deux sources : ou la force et la violence de celui qui s’en est emparé ; ou le consentement de ceux qui s’y sont soumis. »

Diderot, article de l’Encyclopédie : « autorité politique », 1751.

L’Encyclopédie de Diderot, article sur l’AGNUS SCYTHICUS (Histoire Naturelle Botanique)

Il s'agit de la peau d'agneau mort-né dont on fait une fourrure. Diderot rappele ce que l'on sait à son époque de l'agneau de Scythie. Certains auteurs prétendent qu'il s'agit d'une plante. Diderot en profite pour établir une méthode critique.

« Il faut considérer les témoignages en eux-mêmes, puis les comparer entre eux : les considérer en eux-mêmes, pour voir s'ils n'impliquent aucune contradiction, et s'ils sont de gens éclairés et instruits : les comparer entre eux pour découvrir s'ils ne sont point calqués les uns sur les autres, et si toute cette foule d'autorités (...) ne se réduirait pas par hasard à rien, ou à l'autorité d'un seul homme.

Il faut considérer si les témoins sont oculaires ou non ; ce qu'ils ont risqué pour se faire croire ; quelle crainte ou quelles espérances ils avaient en annonçant aux autres des faits dont ils se disaient témoins oculaires : s'ils avaient exposé leur vie pour soutenir leur déposition, il faut convenir qu'elle acquerrait une grande force ; que serait-ce donc s'ils l'avaient sacrifiée et perdue ?

Il ne faut pas non plus confondre les faits qui se sont passés à la face de tout un peuple, avec ceux qui n'ont eu pour spectateurs qu'un petit nombre de personnes. Les faits clandestins, pour peu qu'ils soient merveilleux, ne méritent presque pas d'être crus : les faits publics, contre lesquels on n'a point réclamé dans le temps, ou contre lesquels il n'y a eu de réclamation que de la part de gens peu nombreux et mal intentionnés ou mal instruits, ne peuvent presque pas être contredits.

Voilà une partie des principes d'après lesquels on accordera ou l'on refusera sa croyance, si l'on ne veut pas donner dans des rêveries, et si l'on aime sincèrement la vérité. »

sur l’esclavage

"En approchant de la ville, ils rencontrèrent un nègre étendu par terre, n'ayant plus que la moitié de son habit, c'est-à-dire d'un caleçon de toile bleue ; il manquait à ce pauvre homme la jambe gauche et la main droite. "

Eh ! mon Dieu! lui dit Candide en hollandais, que fais-tu là, mon ami, dans l'état horrible où je te vois ? - J'attends mon maître, M. Vanderdendur, le fameux négociant, répondit le nègre. - Est-ce M. Vanderdendur, dit Candide, qui t'a traité ainsi ?

- Oui, monsieur, dit le nègre, c'est l'usage. On nous donne un caleçon de toile pour tout vêtement deux fois l'année. Quand nous travaillons aux sucreries, et que la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main ; quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe : je me suis trouvé dans les deux cas. C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe. Cependant, lorsque ma mère me vendit dix écus patagons sur la côte de Guinée, elle me disait : " Mon cher enfant, bénis nos fétiches, adore-les toujours, ils te feront vivre heureux ; tu as l'honneur d'être esclave de nos seigneurs les blancs, et tu fais par là la fortune de ton père et de ta mère. " Hélas ! je ne sais pas si j'ai fait leur fortune, mais ils n'ont pas fait la mienne. Les chiens, les singes et les perroquets sont mille fois moins malheureux que nous ; les fétiches hollandais qui m'ont converti me disent tous les dimanches que nous sommes tous enfants d'Adam, blancs et noirs. Je ne suis pas généalogiste ; mais si ces prêcheurs disent vrai, nous sommes tous cousins issus de germain. Or vous m'avouerez qu'on ne peut pas en user avec ses parents d'une manière plus horrible."
Extrait de Voltaire, Candide ou l'optimisme, 1759.

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