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lycée banlieue culture
14 décembre 2007

Le traité d’ibn ‘Abdun (1100 env.)

Andalousie, vers l’an 1100

« Ce texte est disponible sous les termes de la Licence Creative Commons Paternité-Partage des Conditions Initiales à l'Identique 3.0 Unported (CC-BY-SA) »

L’auteur

Muhammad ibn Ahmad Ibn ‘Abdun, magistrat musulman peu important de Séville, fin XIe siècle-début XIIe siècle.

Son traité constitue une bonne description de la vie quotidienne. L’auteur donne l’impression d’être une sorte de vieux grincheux puritain et intolérant. Mais de son côté, la minorité chrétienne se montrait parfois insultante vis-à-vis des Musulmans.

Il n’est pas certain que les interdictions prônées par l’auteur aient été mises en pratique. Sinon, pourquoi prendrait-il la peine de les énoncer ?


Texte utilisé en cours d'histoire de Seconde.


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« § 152. Les bassins des bains publics devront être munis de couvercles ; s’ils demeurent à découvert, on ne peut éviter que l’eau qu’ils contiennent ne se souille, alors qu’il s’agit précisément d’endroits qui doivent être propres par définition. Dans les thermes, le baigneur, le frotteur et le barbier ne doivent circuler qu’en caleçon ou en culotte courte.

§ 153. Un musulman ne doit pas servir de masseur à un juif ou un chrétien ; il ne doit ni nettoyer leurs ordures, ni nettoyer leurs latrines : le juif et le chrétien sont effet plus désignés pour ces besognes qui sont des travaux vils. Un musulman ne doit pas s’occuper [comme guide ou palefrenier] de la bête d’un juif ou d’un chrétien ; il ne doit pas leur servir d’ânier, ni leur tenir l’étrier. Si l’on s’aperçoit que quelque musulman a contrevenu à ces défenses, il sera blâmé.

§ 154 On doit empêcher les femmes musulmanes d’entrer dans les églises abominables : les clercs sont en effet des débauchés, des fornicateurs et des sodomites. Il sera interdit aux Franques de pénétrer dans l’église d’autres jours que les jours d’office ou de fêtes religieuses : car elles ont coutume d’aller y banqueter, boire et forniquer avec les clercs. De ces derniers, il n’en est pas un qui n’en ait deux ou davantage comme maîtresses, et qui ne passent leurs nuits avec elles. C’est devenu chez eux un usage établi, car ils ont déclaré illicite ce qui licite et licite ce qui est illicite. Il faut ordonner aux clercs de se marier, comme cela se fait en Orient. S’ils y tenaient d’ailleurs, ils le feraient !

Il ne faut tolérer dans la maison d’un clerc la présence d’aucune femme, vieille ou non, si ce clerc persiste à demeurer dans le célibat. On doit les forcer à se faire circoncire, ainsi que les y obligeait al-Mu’talid ‘Abbad : ils prétendent en effet suivre les règles de jésus – qu’Allah le bénisse et le sauve ! Or Jésus était circoncis, et l’anniversaire du jour de sa circoncision est pour eux une fête qu’ils célèbrent solennellement. Pourquoi dès lors délaissent-ils cette pratique pour eux-mêmes ?

§ 164. On ne doit pas vendre de manteau ayant appartenu à un lépreux, à un juif ou à un chrétien, à moins qu’on en fasse connaître l’origine à l’acquéreur éventuel ; de même si ce vêtement a appartenu à un débauché. On ne doit pas prendre de pâte comme salaire de cuisson du pain d’un lépreux. On n’achètera ni œufs, ni poulets, ni lait, ni toute autre denrée à des lépreux, qui en feront le commerce entre eux seulement. […]

§ 166. Il faut interdire aux diseurs de bonne aventure de se rendre à domicile, car ce sont des voleurs et des fornicateurs. […]

§ 168. Les prostituées ne doivent pas se tenir tête nue à l’extérieur de la maison publique. Les femmes honnêtes ne doivent pas s’attifer de manière à leur ressembler. Il faut leur interdire d’user d’artifices de coquetterie, quand elles sont entre elles, et d’organiser des réunions pour se divertir, même si elles en ont reçu l’autorisation de leurs maris. Il faut défendre aux danseuses de se dévoiler le visage. […]

§ 205. Il faut interdire définitivement aux femmes d’organiser des parties de plaisir et des beuveries sur le fleuve, d’autant plus qu’elles s’y rendent parées de tous leurs atours. […]

§ 206. On ne doit pas vendre aux Juifs ou aux chrétiens des livres de science, sauf s’ils ont trait à leur propre loi; en effet, ils traduisent les livres de science et en attribuent la paternité à leurs coreligionnaires et à leurs évêques, alors qu’ils sont l’oeuvre de musulmans ! Le mieux serait de ne laisser aucun médecin juif ou chrétien s’installer pour soigner les musulmans. Ne pouvant en effet nourrir de bons sentiments à l’égard d’un Musulman, ils n’ont qu’à soigner leurs coreligionnaires ; comment, les sachant dans cet état d’esprit, pourrait-on leur confier des vies de Musulmans ?

Source : E. Lévi-Provençal, Séville musulmane au début du XIIe siècle, le traité d’ibn ‘Abdun sur la vie urbaine [...], Maisonneuve 1947.

Ouvrage trouvé à la bibliothèque de l’Institut du monde arabe à Paris. Un lieu formidable pour y passer un après-midi.


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